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Aliénor femme de pouvoir

Des titres honorifiques, ou une réelle influence politique ?
Chapelle Sainte Radegonde Chinon Chapelle Sainte Radegonde Chinon Chapelle Sainte Radegonde Chinon Chapelle Sainte Radegonde Chinon
© Fabienne Bouéroux  Ville d'Art et d'Histoire de Chinon

Duchesse, comtesse, reine de France et enfin reine d’Angleterre, Aliénor d’Aquitaine a connu un destin hors du commun.

Les titres qu’elle possédait étaient-ils honorifiques ou Aliénor était-elle réellement une femme de pouvoir ?

Podcast : Aliénor, une femme de pouvoir
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Comtesse et duchesse

Née vers 1124, Aliénor est la fille de Guillaume X, duc d’Aquitaine et de Aénor de Châtellerault.

Le couple a eu trois enfants :  Aliénor l’ainée, Pétronille et Guillaume Aigret.

En 1130, Guillaume et sa mère décèdent, laissant le jeune duc veuf de 31 ans et sans héritier mâle. Il envisage de se remarier avec Emma de Limoges mais cette dernière est enlevée alors qu’il est en campagne militaire en Normandie.

La campagne est un échec, l’armée est touchée par la dysenterie. Le duc rentre en Aquitaine affaibli.

Il décide de prendre le bâton de pèlerin pour se rendre à Saint-Jacques de Compostelle.

Qui va assurer la sécurité des filles de Guillaume et de ses territoires ?

Deux choix s’offrent à lui :  son frère Raymond de Poitiers, qui est à Antioche, ou la protection féodale du roi Louis VI le gros. L’aquitaine représente à l’époque un quart de la France et l’absence de son duc pourrait attiser la convoitise de ses voisins. Aliénor, héritière du duché, n’est pas mariée. 

Guillaume place ses filles et ses terres sous la protection de Louis VI. Un mariage est envisagé entre Aliénor et le fils du roi. En faisant ce choix, Guillaume assure à sa fille un avenir royal.

Le 9 avril 1137, Guillaume meurt. Aliénor devient duchesse d’aquitaine et comtesse de Poitiers.

Le mariage entre Aliénor et Louis VII est célébré en juillet et peu après, le roi de France Louis VI décède à son tour. En l’espace de quatre mois la jeune fille de 15 ans devient comtesse, duchesse… Puis reine de France ! Aucun document ne nous permet d’appréhender l’état d’esprit d’Aliénor, mais des chartes de confirmation de donations, notamment pour des abbayes comme Fontevraud, prouvent qu’Aliénor prend possession de ses terres et de son pouvoir.

La reine de France

Nous connaissons une vingtaine de chartes signées ou cosignées par la reine Aliénor et son mari, toutes dans les dix premières années de règne. Elles concernent surtout la confirmation de privilèges pour des établissements religieux. Le pouvoir d’Aliénor s’exerce surtout en privé. Les historiens s’accordent à dire que Louis VII aimait beaucoup sa femme et la reine va profiter de la situation pour l’influencer politiquement.

Aliénor incite son époux à dissoudre le mariage de Raoul de Vermandois pour que sa sœur, Pétronille, l’épouse. Cousin du roi, Raoul deviendrait le beau-frère d’Aliénor, ce qui assurerait la protection de l’Aquitaine en cas de décès de cette dernière sans descendance. Sept ans de mariage et toujours pas d’enfant pour le couple royal !

En 1144, le comté d’Edesse est repris par les musulmans. La pape Eugène III prêche la croisade. Louis VII et Aliénor prennent la croix et partent pour l’Orient.

Ce voyage est pour Aliénor l’occasion de revoir son oncle Raymond de Poitiers qui est à Antioche. Les relations entre Aliénor et son époux se détériorent. Aliénor soutient son oncle qui souhaite la reprise d’Edesse alors que Louis VII préfère se rendre en pèlerinage à Jérusalem.

Aliénor demande l’annulation de son mariage pour cause de consanguinité. Emmenée de force par son époux à Jérusalem, elle est mise à l’écart des décisions et perd de son influence.

De retour en France et malgré l’intervention de l’abbé Suger qui veut préserver le mariage, ce dernier est annulé lors du Concile de Beaugency le 18 mars 1152.

De nouveau célibataire, Aliénor est désormais libre d’épouser qui elle souhaite. Le chroniqueur Gervais de Canterbury affirme qu’Aliénor aurait invité Henri Plantagenêt, comte d’Anjou à la rejoindre pour l’épouser. La duchesse d’Aquitaine reprend son avenir en main.

Carte de la France en 1154

La duchesse d’Aquitaine à l’initiative de son second mariage royal ?

Le 18 mai 1152, Aliénor épouse Henri Plantagenêt.

Nous connaissons environ 90 chartes signées par la duchesse-reine d’Angleterre.

Louis VII refuse de rendre l’Aquitaine malgré l’annulation du mariage. Henri ne peut donc pas intervenir et ne co-signe aucun document concernant l’Aquitaine.

En 1154, désigné héritier de son oncle Etienne de Blois, Henri devient roi d’Angleterre et souhaite unifier l’administration de ses territoires continentaux. Aliénor va servir d’appui pour son époux en Angleterre et fait appliquer ses décisions. Toutes les chartes signées par Aliénor en Aquitaine durant cette période sont confirmées par Henri.

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Les grossesses d’Aliénor l’ont-elles éloignée du pouvoir ? Huit enfants dont cinq garçons en treize ans : belle prouesse !

L’année 1167 signe le début des années de révoltes : tensions, jalousies, rébellions, Aliénor soutient ses fils contre son époux et essaye de le quitter pour retrouver le roi de France. Cette trahison aboutit à la détention de la reine à Chinon puis en Angleterre pendant quinze ans, c’est-à-dire jusqu’à la mort de son mari en 1189. 

Richard cœur de lion sacré roi, Aliénor devient douairière.  Elle soutient son fils que ce soit lors des révoltes poitevines ou encore en tant que régente d’Angleterre lorsque Richard part en croisade. Richard prisonnier par l’empereur germanique, c’est Aliénor qui rassemble la rançon demandée : deux ans de chevauchées pour réunir la plus grosse rançon de l’histoire.

Son fils libre, Aliénor se retire en 1194 à l’abbaye de FontevraudPrendrait-elle sa retraite ? Non ! A la mort de Richard, en 1199, elle revient pour faire accepter son fils Jean comme roi face à la candidature de son neveu, Arthur de Bretagne, soutenu par le roi de France Philippe Auguste.

L’assassinat d’Arthur par Jean entraine une nouvelle guerre contre le roi de France. 

Une trêve est signée en 1200, appelée « Traité du Goulet ». Pour sceller ce traité, la petite fille d’Aliénor, Blanche de Castille est promise au fils du roi de France. A 76 ans, Aliénor part elle-même la chercher en Espagne.

Peu de temps avant sa mort en 1204, la commande des gisants de l’abbaye de Fontevraud par Aliénor pour son époux, son fils Richard et elle-même, fige dans la pierre les visages de la dynastie des Plantagenêts.